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- Publié le mercredi 28 octobre 2009 11:48
Me Claude Assamba, l’un des avocats de la Défense de l’ex-ministre de la Santé publique analyse l’ordonnance du juge d’instruction et jette un regard sur la suite de l’affaire.
Quelle lecture faites-vous de la décision du juge d’instruction de renvoyer votre client devant le tribunal de grande instance du Mfoundi ?
L’ordonnance de clôture de l’information judiciaire rendue par le juge d’instruction dans ce dossier est un véritable déni de vérité, un refus d’instruire qui consiste en une contradiction de fond entre le juge et les deux experts qu’il a commis au cours de l’information judiciaire. Les deux experts indépendants agréés auprès de la Cour d’appel du Centre ont rendu un rapport dont les conclusions sont sans appel : « Nous pouvons affirmer que toutes les opérations financées par ces deux bailleurs de fonds n’ont pas connu au cours de la période de mise à disposition des fonds, d’irrégularités significatives pouvant être qualifiées de détournement de deniers publics. Il importe de souligner pour une meilleure compréhension des différents dossiers retenus, que les financements obéissent à des procédures spécifiques comportant des étapes obligatoires et successives suivant des indications précisées dans les manuels de procédures : l’examen d’un cas isolé de son contexte réglementaire ne peut conduire qu’à une conclusion erronée. » Cette conclusion des experts confirme la position ferme du directeur exécutif du Fonds Mondial de lutte contre le Sida, le Paludisme et la Tuberculose qui, dès l’arrestation de mon client avait rejeté en bloc dans une lettre aux membre de son comité de Direction, toutes allégations de détournements des fonds que son organisme a alloués au Cameroun.
Aussi, les arguments utilisés par le juge d’instruction dans cette affaire pour renvoyer mon client sont spécieux et ne peuvent résister à la vérité des faits telle qu’exposée par mon client.
Au regard des motifs qui sous-tendent cette ordonnance de non lieu partiel et de renvoi, l’on est légitimement en droit de se demander aujourd’hui qu’est ce qu’un détournement de deniers publics ?
Car le distinguo n’est plus fait entre l’irrégularité de pure forme consistant en une omission, la faute purement administrative imputable à un collaborateur, la faute de gestion et la faute pénale qui a pour moteur la volonté délibérée, l’intention de commettre l’acte infractionnel, c'est-à-dire l’atteinte à la fortune publique.
Le détournement est devenu un véritable serpent de mer, une espèce de fourre-tout dans lequel les juges assimilent indistinctement les trois fautes au point de faire de l’infraction de détournement des deniers publics, une infraction purement matérielle au mépris des règles qui gouvernent le droit pénal et notamment le sacro-saint principe de la responsabilité pénale individuelle et personnelle.
Quelle va être, d’après vous, la suite de l’affaire ?
Mon client est renvoyé pour répondre de quatre infractions sur les dix pour lesquelles il avait été préalablement inculpé. Cela signifie que le juge l’a mis hors de cause sur cinq infractions et ordonné une disjonction de procédure sur le volet médicament. Nous irons devant le tribunal de Grande instance sûrs de notre vérité car c’est la vérité des faits, et cette vérité est invincible face aux affabulations. Pour autant, les conditions d’un procès équitable supposent que les juges respectent leur serment et rien que celui-ci afin que justice soit enfin rendue à mon client.